TROIS CHOSES A SAVOIR SUR LES ELEPHANTS

TROIS CHOSES A SAVOIR SUR LES ELEPHANTS

Notre ami Emmanuel Pervé a écrit ceci :
Même si tous ceux qui me connaissent savent parfaitement que je préfère observer les éléphants sauvages vivant dans le milieu naturel, le fait est que la Thaïlande compte aujourd’hui plus de 3500 éléphants domestiques.
J’ai constaté ces derniers temps sur Facebook que plusieurs personnes, genres de nouveaux censeurs ou idéologues perturbés, se permettaient de juger les camps d'éléphants du royaume sans même les avoir tous parcourus, accumulant les fausses informations, les clichés dépassés, et faisant bien rire les gens qui, comme moi, travaillent avec ces animaux depuis 25 ans !... Je voudrais donc aujourd’hui revenir sur plusieurs de leurs affirmations fausses et vous donner des éléments qui vous permettront, je l’espère, de vous faire un avis plus objectif et documenté.
 

1/ Peut-on monter sur un éléphant ?

Les éléphants (ainsi que les chiens, les chevaux, les humains, etc.) ont des disques intervertébraux ronds et lisses situés entre les vertèbres tout le long de la colonne vertébrale pour assurer un "rembourrage" entre les os. Tous ces mêmes animaux (y compris les humains) ont des apophyses épineuses qui font partie de l'os et s'étendent vers le haut à partir du sommet de chaque vertèbre, permettant la fixation des muscles et des ligaments pour la stabilisation.
Les humains, qui sont bipèdes, ont une quantité minimale d’attaches musculaires. Les animaux tels que les chevaux, les ânes, les rhinocéros et les éléphants sont mieux équipés pour se protéger autour de la colonne vertébrale en raison de leur développement musculaire important et de leur quadrupédie, ce qui leur permet de répartir leur poids uniformément. Les angles des articulations des jambes sont minimes, de sorte que ces dernières, comme les piliers, sont plus capables de supporter un poids très important. L’évolution a bâti l'éléphant dans le but de maximiser ses capacités de portance ainsi que l'équilibre de son système squelettique.
La taille moyenne des éléphants est d'environ 3 000 à 3 500 kg. 1 ou 2 personnes adultes montant sur leur dos sans chaise représentent moins de 4 % de leur poids corporel. Avec une chaise, ils ne dépassent rarement 10 %. Selon certains, il est acceptable qu’un cheval porte 20 % de son poids corporel et inacceptable que les éléphants en portent moins de 10 % alors qu’ils sont bien plus forts et adaptés à ce genre d’activité en raison de leur anatomie unique. De plus, les os longs avant et arrière de l'éléphant sont très solides car ils n'ont pas de cavité médullaire mais possèdent une structure osseuse dense. Scientifiquement parlant, cela signifie qu’ils peuvent supporter plus de poids que n’importe quel autre mammifère. Il faut savoir que cette bêtise selon laquelle on ne peut pas monter un éléphant a été lancée il y a 10 ans par la célèbre propriétaire d'un camp d'éléphants (je ne veux pas dire ici son nom !) qui voulait tuer la concurrence des autres camps d'éléphants… Et comme les Occidentaux ne connaissent souvent pas grand-chose à la science, ils ont répété cette information fausse en utilisant une information encore plus stupide qui affirme que la structure de la colonne vertébrale des pachydermes ne permettrait pas de les monter... Comme me l'a dit un ami vétérinaire thaïlandais, nous montons des éléphants depuis des millénaires, pourquoi cela devrait-il changer aujourd'hui alors que la structure du corps de l'éléphant, elle, n'a pas changé ?!!!...
 

2/ Peut-on se baigner avec un éléphant ?

Certains de nos censeurs de Facebook affirment que l’on ne doit pas se baigner avec des éléphants !!!... Mais où ont-ils été chercher une telle ânerie ?... Les éléphants, qu’ils soient sauvages ou domestiques, ont besoin de nombreux bains quotidiens, afin de se rafraîchir et de protéger leur épiderme du soleil et des nombreux parasites qui viennent se loger dans les interstices de leur peau. Les « mahout » (kornak) et accessoirement les touristes contribuent à la bonne santé des éléphants lors des bains car ils peuvent nettoyer certaines parties du corps que l’éléphant n’atteint pas lui-même, lui évitant ainsi de contracter de nombreuses infections épidermiques. Ce n’est pas un hasard si les éléphants domestiques vivent en moyenne 20 ans de plus que les éléphants sauvages (il y a bien sûr la qualité de la nourriture qui entre en jeu, mais les soins et surtout l’hygiène y sont pour beaucoup !).
 

3/ Qu’est-ce que la méthode du Phajaan ?

Certains de nos censeurs de Facebook nous mettent sous les yeux les deux éternelles mêmes photos représentant un éléphant ficelé dans un carcan de bois et de cordes nommé Phajaan… Je voudrais donc rappeler que cette méthode de dressage dure était, dans le passé, utilisée pour dresser des éléphants sauvages capturés dans la jungle. Les hommes « cassaient » physiquement et moralement l’animal jusqu’à ce qu’il se soumette et obéisse à ses nouveaux maîtres (des méthodes également dures étaient utilisées en d’autres lieux pour soumettre les chevaux sauvages). De nos jours, il est interdit de capturer des éléphants sauvages (ils sont même hyper protégés en Thaïlande et ont vu leur population augmenter ces dernières années !), ce qui rend obsolète le Phajaan. Tous les éléphants domestiques naissent aujourd’hui en état de domesticité et apprennent leurs éventuelles tâches à la voix et à l’imitation des adultes (méthode Shan aussi appelé méthode Karen). Par chance, les éléphants d’Asie ont le plus important volume de cortex cérébral disponible et des neurones en fuseau (comme l’homme, les primates et certains cétacés), ce qui leur permet une cognition importante, de réelles capacités d'apprentissage et une grande variété de comportements.
Notons que si le dressage au Phajaan existait encore aujourd’hui en Thaïlande, internet serait inondé de milliers de photos de smartphones montrant cette horreur. Hors, ce n’est pas le cas ! Vous pouvez faire toutes les recherches que vous souhaitez, vous ne trouverez jamais plus de 2 ou 3 très vieilles photos montrant sur internet le dressage au Phajaan !
 

4/ Pourquoi certains éléphants ont parfois une chaîne au pied ?

Il faut savoir que les éléphants ont de temps à autre des périodes difficiles. Les mâles, en période de musth, voient leur niveau de testostérone considérablement augmenter (jusqu’à 60 fois plus qu’en période normale !) et peuvent développer des comportements agressifs. Les femelles en période de gestation, peuvent également se montrer agressives et dangereuses pour leur entourage. Dans les deux cas, il est préférable d’entraver l’animal afin d’éviter les désastres. Et comme tout le monde le comprendra aisément, on n’attache pas un éléphant de 3 ou 4 tonnes avec une cordelette. La chaîne est donc nécessaire.
Notons également que les cultures ont vu leurs surfaces considérablement augmenter ces dernières années et que les camps d’éléphants se retrouvent souvent enclavés aux milieux des plantations humaines dont les limites sont totalement inconnues des pachydermes. La seule façon d’empêcher les éléphants d’aller manger les fruits ou les cannes à sucres faciles d’accès que les hommes cultivent, et donc d’éviter des situations qui peuvent conduire à la mort des animaux (des pachydermes ont été abattus ou empoisonnés par des paysans en Inde ou au Sri Lanka !) est de les enchaîner la nuit.
Voilà, je pourrais encore disserter longtemps sur ce sujet, expliquer par exemple que les « mahout » (kornak) en Thaïlande sont très majoritairement des Karen et qu’ils considèrent leur éléphant comme un membre à part entière de leur famille (dans le passé, la taille des piliers des maisons étaient calculée en fonction de la taille de l’éléphant familial, preuve de son importance au sein du foyer !). Bref, ils adorent leurs animaux et les pleurent comme on pleure un enfant ou une épouse lorsqu’ils décèdent. Il y a bien sûr quelques mauvaises personnes qui maltraitent leur éléphant mais elles sont très rares (en 25 ans, j’en ai très peu rencontré !). En fait, le vrai problème qui se posait, il y a encore quelques années, dans certains camps (pas tous, seulement ceux très fréquentés par les touristes), était principalement l’excès de travail quotidien qui empêchaient les pachydermes de se nourrir convenablement (un éléphant doit manger presque toute la journée car il doit consommer de 200 à 300 kilos de plantes par jour - graminées, miscanthus, fruits, etc. – et son système digestif en élimine directement plus de 60 %, d’où la nécessité de manger en permanence), les conduisant à la dénutrition et parfois au « burn out ».
J’invite donc tous ceux qui souhaitent rencontrer des éléphants à ne pas croire toutes les âneries qui sont véhiculées sur Internet par des personnes parfois bienpensantes mais souvent très idéologisées (c’est la grande mode aujourd’hui !) et ne connaissant finalement pas grand-chose à la science complexe qu’est l’éthologie animalière (on a d’ailleurs vu ces derniers temps fleurir les pseudo-spécialistes dans bien d’autres domaines !). Faites-vous un avis personnel et objectif et gardez à l’esprit que l’on ne connait pas un sujet en seulement quelques heures ou quelques jours. Les apparences sont souvent trompeuses !
...
Chez nous, on les appelle les "E P A" (excessifs dans la Protection Animale)
Merci Manu !
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